Touchant témoignage…

Equipe 11 : Barbar Stages Survie – Les Spartiates
Capitaine : Arnaud Raymond
Coureurs : Benjamin Béziel, Nicolas Ruiz
Cécile Gagneret, leur féminine, s’est blessée quelques jours avant le départ de la course.
Voici le témoignage que ses coéquipiers, engagés à 3 dans l’aventure Raid in France 2016,  lui dédient.

img_1060Pour Cécile,

« Le Raid in France, RIF pour les intimes, est un véritable événement dans le monde du raid, du sport, et pour ceux qui y participent.

Cette course est magnifiquement préparée et mise en scène, à la hauteur du défi physique qu’elle représente. Le choix des villes d’accueil pour le départ et l’arrivée, la localisation des Aires de Transition et même des Checkpoints, les cérémonies d’ouverture et de clôture, la ligne d’arrivée avec les drapeaux, les applaudissements, le champagne, et la bande son qui va bien, créée pour l’occasion. Oui la mise en scène est superbe et sublime les émotions déjà si exacerbées par la fatigue.

C’est notre deuxième RIF, toujours une équipe verte et un peu chaotique. Benjamin n’a fait que six sections en 2014 avant de nous quitter pour blessure. Nicolas fait du trail à gogo mais question raid, il est plutôt vintage et Défis Dole, Cécile des XTTR ne sera carrément pas là car elle s’est cassée la clavicule le 14 août. L’organisation nous permet quand même de prendre le départ à trois, directement hors classement, mais sans filet.

La première épreuve, c’est toujours la vérification du matériel et la préparation des caisses. Une vraie science qui fait la différence entre les équipes prêtes et expérimentées. Il doit y avoir une courbe de corrélation entre les temps que mettent les équipes à ce moment là et leur classement !

Le profil du parcours est distribué dans l’après-midi.

Voilà ce qui fait la magie du RIF. Une centaine de bénévoles pour que tout roule. Une vraie ambiance de village de départ. De la course dans l’air mais pas de tension entre les équipiers. Le parcours est tellement énorme que les autres équipes sont d’avantage perçues comme des personnes qui pourront nous aider dans la montagne que comme concurrentes. Pour le matériel est la préparation tout le monde a de bonnes idées et de moins bonnes. La grande tendance de l’année est que l’on dormira davantage. Mais sinon les caisses VTT de Seagate sont désespérément vides jusqu’à une heure du départ, 400Team arrive le matin même, Cap Opale a transformé ses caisses vélo en véritables commodes, Sportera II travaille la stratégie de course de terrasse en terrasse, difficile de se faire une idée…

En tous cas nous sommes prêts le vendredi soir, bien plus tranquilles que la dernière fois.

La cérémonie d’ouverture est toujours un grand moment : détails du parcours, de la dénivelé, les traceurs nous racontent des anecdotes romantiques sur le parcours, les premières questions fusent, semant le doute.

Une chose est sûr, on n’aura pas le temps de ramasser des Pokémons ni assez de petits cailloux pour pouvoir faire demi tour.

Cette année, peu de sections, 11, et l’obligation de dormir 11h avec la possibilité de le faire aux CP ou aux AT. Enfin les vacances !

11 sections c’est bien,  c’est dans les transitions que nous perdons du temps et nous aurons plus de temps pour nous « installer » dans les activités. Nous établissons un programme en notant tous les temps maximum proposés par section plus une heure par transition plus les temps de sommeil obligatoires. Ce qui nous amène samedi à 11h pour l’arrivée.  Nous serons à peu près à l’heure pour le mariage de notre ami William. Hahahaha les optimistes.

La journée du samedi est passée à finaliser les caisses et la répartition de la nourriture. Nous avons aussi tout tenter pour trouver une féminine, au cas ou… Mais Cécile reste irremplaçable.

Les heures passent en attendant minuit. Malgré notre petite sieste de la journée, le constat est simple, nous allons partir pour deux nuits blanches d’affilé en espérant dormir lundi matin tôt. L’ambiance monte sur la place de Font-Romeu, un peu de public est là.

Minuit, l’heure du crime.

Départ pour une CO ou certains nous doublent à balle, comme un dimanche matin. Après tout il ne reste jamais que 430 bornes derrière pour rentrer à la maison ! Vas-y champion. Les 500 premiers mètres je suis le flot, impossible de savoir ou je suis, pareil pour les copains. Finalement nous faisons la CO en marchant d’un pas rapide et finissons en 55 minutes sur les 1h maximum prévues, ça me va de partir à mon rythme.

Le trek attaque en pleine montagne, magie du raid long. Nous sommes déjà dans le silence, entre équipiers, avec seulement quelques lumières éparses sur les crêtes et dans les sous bois. Chacun fait plus ou moins ça route. Le pas se fait moins léger, le souffle plus profond, on part pour la plus belle des traces, jusqu’à la mer.

Les premiers torrents de montagne nous cueillent rapidement. Une balise c’est si petit sous les étoiles et dans la montagne immense. Pourtant nous égrenons les numéros comme une dévote son chapelet. Nous sommes partis et bien partis. C’est ce que l’on peut se dire quand on croise Eric Maire ou les R’Adys, on n’est pas les plus moches.

Le Carlit nous temps les bras mais nous préférons passer un col 300 mètres au Sud, de nuit, dans les pierriers rocambolesques (comme Seagate !). Décidément nous sommes des marginaux. Le soleil se lève du de magnifiques lacs de montagne, crêtes, sommets au milieu des myrtilles. On voudrait tellement s’arrêter pour camper et profiter. Mais le tempo de la course est en nous, la passion, la fureur. Malgré la fatigue des uns et des autres les pas se font, désormais sous le soleil, mais toujours sur la trace qui permet aux cœurs purs de relier les sommets altiers à la mer nourricière, de crée une vie éclatante.

Le 50.000ème n’est pas encore rentré dans les habitudes de l’orienteur. Nous découvrons de nouveau lac, de nouveau chemins. C’est aussi le charme du RIF, cette navigation, du à ces vastes cartes. Ça donne une petite dimension d’aventure, d’exploration.

Nous arrivons au soir tombant pour la dernière portion du trek. Après la haute montagne, c’est le tour des interminables collines. Nous tenons à coup de micro siestes, seul dans la nuit. Intersport ayant voulu visiter les alentours. Il en faut du courage pour faire l’affront à une telle équipe et la quitter pour ramper de nos propres cuisses dans les champs de rhododendrons infinis.
A nous les longues pistes blanches dans la nuit. C’est long. Beaucoup d’équipes ici se disloqueront…

Nous arrivons à la fin du trek, dernière balise avant l’AT et le sommeil bien mérité. Nous la trouvons facilement, au pied de son mur. Et après ce ne sera plus qu’une longue nuit d’errements. La piste en lacets, n’a pas la bonne longueur, pas la bonne direction, n’arrive pas au bon endroit. Et la pente autour, semble si… pentue. Il nous faudra le point du jour pour se rendre compte de nos erreurs, puis, fonçant tête baissée dans la foule des forêts frondeuses rejoindre la tant attendue piste sableuse. Mais est-ce la bonne ?

Des traces de baskets à foison, un emballage de barre énergétique exotique, bien peu de signes. Finalement notre orienteur reprend les choses en main et nous arrivons vers 10h là ou nous espérions crânement, c’est-à-dire en respectant les temps maximum proposés plus une heure, arriver vers les 5h…

48h sans trop de sommeil depuis la grasse matinée de samedi écourtée à Font-Romeu. On est bien tintin. Mais à notre grande surprise les tentes qui nous accueillent pour nos deux premières heures de sommeil à décompter sont vides. C’est clair, les premières équipes sont parties depuis belle lurette, mais dernière nous ça compte les travées dans les sapinières !

Le rafting à trois, Cécile, tu nous manque, réveille le raider résolu dans sa fois ! C’est sûr, c’est frais, ça glisse, les BE de surveillance nous « poucent » après les rapides, merci Benjo, pagaie d’or pour la deuxième fois ! Seulement voilà, les 400 bornes qui restent, on ne va pas se les frapper le cul sur un boudin en regardant passer les martins pêcheurs. Il s’agit d’enfourcher nos destriers suspendus, de carbone et d’alu, pour visiter le pays. Ça roule, ça monte, c’est cool, ça se la raconte. On arrive tant bien que mal à s’extraire des quelques villages que nous traversons. Jamais simple sur une carte au 50.000ème. Et puis soudain c’est le drame, alors que de belles pistes s’offraient à nous pour contourner la montagne nous choisissons de passer tout droit. Mais pourquoi ? Nous avons rêvé les mots de Pascal disant qu’il y aurait des zones « No Way ». Nous les avons trouvées, seules, après une nuit en refuge à près de 2.000, sur les crêtes ventées, au soleil levant, traçant notre propre route incongrue dans des sentiers si pentus que jamais trace de crampon ni avait été vue.

Puissance du Raid in France, depuis la veille 20h nous n’avons vu aucune équipe, pas seulement à causse de notre choix hasardeux.

L’arrivée au CP, logiquement placé sur la piste de contournement mais pas du tout en bas de notre crête nous offre l’occasion d’une belle fracture du moral. J’ai envie de pleurer. Les bénévoles nous rassurent malgré tout, nous comprenons que seulement dix à quinze équipes sont passées. Nos mollets sont aussi gros que notre sens de la navigation est faible !

Encore une fois nous faisons ce que nous pouvons pour arriver à l’heure, mais cette fois ce ne sera pas possible. La sanction est sans appelle, pas de trek 2. Intersport non plus. Nous sommes immobilisés pour une 6aine d’heure. Raidsaventure.fr vient de passer. Cap Opale est bloqué avec nous : suite à la perte d’un de leurs équipiers l’organisation veut qu’ils attendent pour repartir pour ne pas perturber la tête de la course. Triste moment.

Petit reconditionnement pour partir d’attaque. Nous avons toujours notre objectif en tête, arriver à la mer sans prendre le bus ! Le deuxième vtt se passe mieux et nous arrivons à nous faufiler, dans la nuit jusqu’aux ateliers de corde et d’eau, avec une leçon encore en tête, au 50.000ème fais au plus simple. Un petit somme de deux heures vient enrichir les lignes de notre « carnet de correspondance du dodo », on est revenu à l’école, buissonnière.

Canyon en montée, spéléo étroite et abrasive, passage par un ermitage encore actif et débouché sur des arrêtes calcaires solaires et sèches que nous affectionnons tant, nous les gars du Sud qui composons les deux tiers de l’équipe. C’est comme si le film du RIF était tourné chez nous. Je me revois tout petit crapahutant dans les buis et les salsepareilles, les chênes kermesses, les jambes griffés et le feu aux joues. Ici c’est le feu partout. Les combis gorgées d’eau et le matériel de corde son notre fardeau à dos.

Vient la belle partie, le haut plateau de crêtes dentelles qui arrive au mythique château de Peyrepertuse via une volage balise 19 à la croisée des pistes de chasseurs et d’animaux. On s’attendrait à trouver l’entrée de la grotte qui mène au trésor des cathares. Mais Nicolas crie que l’on a trouvé le château en voyant de gros rochers à quelques mètres derrière la végétation. Nous glissons au milieu des taillis de buis comme des trolls infernaux peux sûr de notre chemin c’est avec Aquitaine Safety que nous finissons par trouver le départ de la tyrolienne. Paradoxalement nous avons eu besoin d’avoir une équipe à guider pour nous sentir sur de nous. Les espagnols sont partis sur la crête engagée, quand les reverrons-nous ?

Une nuit en salle des fêtes sur les coups de 2h le jeudi matin est la bienvenue. Nous ne sommes que deux équipes. J’ai peur que nous soyons réveillés par la lumière et le bruit des autres équipes qui arrivent. 3 heures plus tard, comment-ça je n’ai pas entendu mon réveil ? Quand nous nous préparons à partir les Espagnols, seules équipes de passage, arrivent à peine. Peine pour eux.

Le VTT nous amène dans des odeurs de garigues, bondissant de mono trace en pistes et enchaînant montées et descentes. Ça roule enfin dans le groupe.

L’accueil est excellent aux AT, et ça fait vraiment partie de la course car en cette journée nous n’avons croisé que les Finlandais de l’équipe Woodman. Après le lit de ruisseau, la balise dans le magnifique château des Termes, les deux grands rappels et le canyon gargantuesque, qu’il est bon de se faire accueillir au cri de « c’est les chouchous !». On se croirait en plein moyen âge, attendu et salués comme le courrier de la ville. De loin en loin ces groupes de bénévoles tous plus sympa les uns que les autres, encore plus quelques un qui se reconnaîtrons, nous font vivre une respiration, une pause, nos aventures se croisent, nos motivations sont les mêmes, nature, contemplation, aventure, bonne humeur, force vitale portée comme dans un calice des crêtes de calcaires aux crêtes d’écumes…

Pas le temps de traîner, les Finlandais semblent remonter intégralement leurs vtt, pédales, guidons, vont-ils passer en slick après lecture de la carte ?

Nous repartons pour la section I, dernier tour de pédale dans les Corbières, sous le jour accablant de soleil, dans les grappes opulentes qui nous éloignent du droit chemin, sirènes du raider. Nous sommes un peu perdus sur le plateau avant la B25. Mais tout rentre dans l’ordre.

Les sentiers longs à vélo monotones nous posent près de l’Aude. La pointe de la courbe est un supplice délicieux. La mer est là et nous l’atteindrons sans croisé la civilisation. Pascal l’a trouvé, ce chemin des écoliers qui fuient la rentrée et qui permet d’aller des plages au centre d’entraînement de Font-Romeu sans passer par la case asphalte, la case maisons avec des écrans blafards allumés dans la nuit.

Aquitaine Safety nous a laissé un petit cadeau pour nous remercier des les avoir tirés des griffes de Peyrpertuse, fruits, chips, coca, le rêve tient à bien peu de choses.

L’Aude est un serpent d’eau, tapis au milieu des cultures et hameaux. Et pourtant, pas de routes, peu de ponts, très peu de villages. Sans être sauvage, elle est farouche et même les pêcheurs ne sont pas trop fréquents. Les premiers rapides me voient passer à la baille. La nuit sera longue, les fesses dans le bidet. Heureusement chaud est l’air et tiède est l’eau. Le 1er cp est trop prêt, le 2ème encore plus, mais le 3ème…. C’est l’Indochine. Le combat pour ne pas s’endormir à chaque coup de pagaie. De véritable coup de pâle dans l’eau. Nous n’avons jamais fait 65km d’affilé en kayak. Peut-être en une année ? Merci le coach pour les pagaies en carbone. Certains dorment, d’autres mangent ou boivent. On ne peut même pas avoir d’hallucinations, il fait noir. La progression est infinie, et moi j’ai vu l’Aude, serpentin de moire, traversant la nuit comme un éclair noir… Enfin le 3ème CP de la rivière est là. Les bénévoles pêcheurs de raiders malgré qu’ils soient prévenus semble toujours étonnés et ravis de nous voir, naufragés des nuits sans lunes. Il nous reste quatre heures à dormir. La pause est bienvenue. Nous retrouvons les réflexes scouts : sortir du cadre, trouver un champ de maïs bien sec, étendre la bâche, s’endormir dans l’ensemble gore-tex, les jambes dans la couverture de survie, la tête sous le camel back.

L’aube nous cueille et l’Aude nous effeuille. La chaleur monte et l’équipe descend. Dit Christophe, l’Amérique, c’est loin ? Nous arrivons au CP de milieu de parcours. A bon, ce n’était pas le précédent ? Nous retrouvons ces bénévoles que nous aimons bien. Ils nous voient passer, commentent la course, la fatigue, l’ambiance, et ce qu’ils ne savent pas c’est que nous commentons aussi. « Tient il a l’air plus sûr de lui, ils doivent bien s’amuser, depuis quand sont-ils là, que font-ils de leur journée ? ». Cécile nous manque bien pour faire la paire dans les bateaux.

Le temps passe, au rythme des pagaies poussant la barcasse. Cette étape est longue, trop longue ? Non, c’est la signature, celle du raid in France, celle qui fait que ce n’est pas un Raid Edhec avec moins de sommeil ou une finale sur 5 jours mais bien un truc un peu dingo qui force le respect dans les paddocks et même vis-à-vis à de soit même. Oui, car quand vous sortez de là, si vous savez vous regarder en face, vous n’aurez plus le droit de vous plaindre. Comment, moi qui est donné plusieurs milliers de coup de pagaie la tête ballotente pour résister au sommeil, moi qui est trouvé la force d’aider mes camarades à refaire leur sac avant l’arrivée, moi qui est tenu la carte, si loin du RIF je me plains en attendant le bus cinq minutes de trop ? On se surprend soit même.

On surprend aussi les bénévoles chargés de faire les photos à la fin du canal qui ne nous on pas vu arriver. Nous frôlons les voiliers, deuxième passion, pourquoi ne pas en prendre un pour finir la course ?

La mer est là, enfin, mais en raid long rien n’est immédiat, l’arrivée nous la voyons, sur la carte, dans nos cœurs, mais pourtant, 5 ou 6 kilomètres. Une vie. Nous en sépare. Benjamin nous tracte, seul dans son canoë, nous l’avions prévu… Il est enfin chaud après 6 jours, 430km, 12.000m D+. C’est pas un diesel le mec, c’est une centrale nucléaire !

L’arrivée se cache derrière un promontoire rocheux. Le vent nous fait face, une dernière balise est là. Les vacanciers bronzeurs interloqués ont à peine le temps de se déplacer, nous remontons le sable en tirant nos kayaks, l’allée de flammes nous tends ses bras si doux mais si difficiles à saisir. Les bénévoles et organisateurs sont là, tous le décor est en place, la musique, générique de nos aventures tourne en font et soudains le bouchon saute, le champagne coule à flot. Nous sommes à bout, de notre premier Rif. C’est notre deuxième plage mais notre premier continuum. Tous les chemins de l’effort mènent à faire de nous des hommes. » Arnaud Raymond

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